19.2.06

Anselm Kiefer à Montréal

J’ai vue cette chose récente : Himmel und Erde, l’exposition d’Anselm Kiefer au Musée d’Art Contemporain de Montréal. Le plomb, l’Allemagne, le fer, le Christ, l’amiante, les champs brûlés, les graines de tournesol, les fleurs de cendre, les Juifs, les noms, les livres, l’hélice, l’Allemagne, le plomb. Rien qui ne soit hostile aux doigts et à la langue. Et puis je découvre cette œuvre qui évoque les femmes de l’antiquité. Les prénoms – j’aurais dû noter tous les prénoms. Mais je n’ai retenu que la texture de leurs vêtements, qui sont pendus dans l’espace, perpendiculaires à la grande toile brune et noire. Ces héroïnes, avant de se couler dans la gloire, ont dû passer de l’extérieur à l’intérieur de ces tissus. Les robes toutes entachées de blanc témoignent de leurs envies, portent l’empreinte de leurs amours décomposés. Je les regarde de près, j’observe la ligne des tuniques et le volume des chemises, je découvre une chaussure, je devine une culotte que je ne vois pas. Artiste voyeur pudique. Les pièces sont engluées dans une substance lourde et collante, qui vient de refroidir il y a tout juste quatre siècles. Tout ici rejette le toucher. Faire l’amour à ces fantômes : éjaculer du mercure.
Esteban Buch

Anselm Kiefer

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